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Le refoulement se justifie juridiquement : L’excès de zèle se cache dans la procédure

Pourquoi les migrants appréhendés sont dirigés vers d’autres villes du Maroc au lieu d’être renvoyés dans leurs pays respectifs


Hassan Bentaleb
Samedi 1 Septembre 2018

La campagne d’arrestations et de refoulements des migrants subsahariens du Nord du Maroc vers l’intérieur du pays se poursuit de plus belle. Des milliers d’entre eux ont été déplacés de force notamment vers les villes de Béni Mellal, Marrakech, Casablanca et Tiznit.
Pour Mustapha El Khalfi, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement et la société civile et porte-parole du gouvernement, il ne s’agit pas d’opérations de refoulement mais de « mesures consistant à transférer les migrants vers d’autres villes » et qui sont destinées à adresser  « un fort message aux réseaux de trafic d’êtres humains pour montrer que leurs actes ont des conséquences ».
Pourtant une question demeure en suspens : ces  refoulements opérés  il y a plus de 20 jours à partir de Nador, Tanger et Tétouan  sont-ils légaux ?  « Les décisions du Parquet concernant ces migrants sont  motivées puisque la loi permet le refoulement de toute personne étrangère qui ne dispose pas de documents légaux de séjour », nous a indiqué Me Abdelmounim Rifai, avocat au Barreau de la capitale du Détroit et président de l’AMDH-section Tanger. Et de poursuivre : « Le vrai problème réside au niveau de l’exécution de ces décisions.  Ces migrants doivent-ils être renvoyés vers la frontière maroco-algérienne ou vers la frontière avec la Mauritanie ? Un problème juridique des plus complexes puisque le Royaume doit traiter quotidiennement  le cas de dizaines de personnes  de nationalités diverses».
Notre source estime que l’illégalité de ces opérations de refoulements est à chercher au niveau  de l’intrusion violente  des forces de l’ordre à l’intérieur des maisons occupées par les migrants  et l’arrestation de ces derniers sans distinction aucune entre ceux dont le séjour est régulier et ceux qui se trouvent en situation administrative irrégulière et entre ceux dont les titres de séjour ont récemment expiré et ceux qui viennent de déposer des demandes de régularisation. Même les malades n’ont pas été épargnés.  
« Beaucoup d’improvisation et d’anarchie marquent ces opérations d’arrestation et de refoulement des migrants », nous a-t-elle précisé. Et d’ajouter : « Ceci d’autant plus que ces migrants sont transférés dans des autocars en majorité  vétustes et sont souvent transportés dans de mauvaises conditions. Pis, une fois les autocars arrivés à destination, ces migrants sont laissés pour compte puisqu’aucune instance ou autorité publique n’est chargée de les accueillir ».
Me Abdelmounim Rifai va plus loin. Il s’interroge sur l’utilité de ces opérations  de déplacement des migrants du Nord vers le Sud du Maroc. « Ces migrants retournent souvent à Tanger ou à Nador. Selon certains témoignages, beaucoup d’entre eux  se sont enfuis lors de ces déplacements. A quoi ça sert donc de  mobiliser autant de forces de l’ordre et mettre leurs vies en danger alors que nombre de quartiers de la capitale du Détroit ont besoin que ces forces s’investissent davantage dans la lutte contre le trafic de drogue. Pourquoi donc gaspiller autant de deniers publics en pareille logistique ?», s’est-il interrogé.    
Le président de l’AMDH-section Tanger nous a également révélé que le rythme des opérations d’arrestations et de  refoulements s’est ralenti ces derniers jours et qu’on est loin des premiers jours de l’opération où des centaines de  migrants avaient été appréhendés. Les quartiers  de Mesnana et Brincica ont été le théâtre de plusieurs interventions des forces de l’ordre qui se sont violemment introduites à l’intérieur de maisons occupées par des migrants  en défonçant leurs portes avant de se saisir de l’argent et des biens des occupants. C’est une première depuis la chasse à l’homme opérée en 2015. « Personne ne sait pourquoi ces refoulements sont déclenchés avec un tel rythme et une telle violence. Des opérations qui vont à l’encontre du choix opéré par l’Etat qui a décidé de mettre en place une nouvelle politique d’immigration et d’asile plus humaine et plus respectueuse des droits de l’Homme.  Les dernières informations sur une pression européenne ne suffisent pas à expliquer tout ou à l’excuser», a-t-il conclu.


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