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Le patrimoine du Népal menacé par une reconstruction bâclée


Jeudi 30 Mars 2017

Le patrimoine du Népal menacé par une reconstruction bâclée
Gardien d'une pagode emblématique du centre historique de Katmandou, Deepak Shrestha a dû cadenasser les ruines du monument ravagé par le séisme de 2015 au Népal pour empêcher les ouvriers chargés de la reconstruction d'y accéder.
Le temple Trailokya Mohan Narayan, un monument à trois niveaux du XVIIe siècle, s'est complètement effondré lors du tremblement de terre de magnitude 7,8 d'avril 2015, qui a fait 9.000 morts dans ce pays himalayen.
Deepak, dont la famille est la gardienne du lieu depuis des générations, doit maintenant protéger ce sanctuaire bouddhiste des effets pervers d'un système de reconstruction du patrimoine endommagé qui octroie les contrats au devis le moins cher.
"Nous avions nos doutes sur les entrepreneurs mais cela s'est confirmé lorsqu'ils ont commencé à creuser les fondations n'importe comment, sans aucun respect pour la communauté et nos rites sacrés", raconte à l'AFP cet homme de 56 ans.
Le temple fait partie des plus de 700 sites historiques du pays altérés par le sinistre, qui a détruit un demi-million d'habitations.
D'après la législation népalaise, lors d'un appel d'offres pour un contrat de construction d'un montant supérieur à 500.000 roupies (4.450 euros), celui-ci doit revenir à l'offre la moins chère. Cette règle s'applique aussi bien pour les locaux administratifs que pour les temples anciens.
Mais la qualité du travail et les techniques utilisées par les entrepreneurs retenus par ce biais inquiètent les experts du patrimoine.
"L'offre la moins coûteuse n'est pas nécessairement la meilleure" pour restaurer un monument ancien, explique Christian Manhart, directeur de l'Unesco au Népal.
Classée au patrimoine mondial, la vallée de Katmandou pourrait "en l'absence de progrès tangibles" être placée en 2017 sur la liste des sites historiques en danger par l'organisation internationale, avait prévu l'Unesco l'été dernier.
Restaurer les temples et monuments abîmés par le séisme devrait coûter plus de 300 millions de dollars, selon les estimations du gouvernement.
Plusieurs pays qui ont promis d'aider le Népal à remettre sur pied son patrimoine historique ont émis des inquiétudes quant aux procédures et à la lenteur de la reconstruction.
Près de deux ans après le tremblement de terre, seuls dix monuments ont été reconstruits - certains en contournant totalement le gouvernement.
Le stupa de Bodnath, monument religieux le plus connu de ce pays himalayen et haut lieu de pèlerinage du bouddhisme tibétain, a pu être restauré grâce à des donations d'organisations bouddhistes basées à l'étranger.
En grande partie réalisé par la communauté bouddhiste, le ravalement - qui a notamment nécessité 30 kg d'or - a coûté plus de deux millions de dollars (1,8 million d'euros).
Dans un Népal très religieux, les temples et les monuments historiques font partie intégrante de la vie quotidienne.
Certains habitants demandent l'annulation des contrats attribués par le gouvernement afin de pouvoir assurer eux-mêmes la reconstruction de ces bâtiments.
"Les demandes des communautés locales sont justifiées", concède Bhesh Narayan Dahal, directeur du département d'archéologie du Népal. "Mais nous sommes impuissants, nous ne pouvons travailler que dans les limites des lois et règles édictées par le gouvernement", ajoute-t-il.
Sans ancrage local, les contractants peuvent avoir du mal à trouver des sculpteurs de bois, de pierre ou des forgerons travaillant selon des méthodes traditionnelles.
Birendra Bhakta Shrestha est à la tête d'une campagne demandant l'implication du voisinage dans la reconstruction du temple Kasthamandap à Katmandou, présenté comme l'un des plus vieux monuments en bois au monde.
Il est déterminé à sauver les monuments historiques des aberrations administratives.
"Nos ancêtres les ont construits et c'est notre droit moral de les reconstruire", explique-t-il. "Les habitants de Katmandou peuvent tout tolérer. Mais pas qu'on s'attaque à notre héritage."


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