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Le gouvernement handicapé par le dossier des personnes à besoins spécifiques

Benkirane dit oui à l’accès des personnes souffrant de handicap à la Fonction publique et Bassima Hakkaoui dit non


Hassan Bentaleb
Mercredi 14 Octobre 2015

Les personnes souffrant de handicap auront-elles le  droit d’être directement recrutées dans la Fonction publique ? « Peut-être », selon le chef du gouvernement et « Non », selon la ministre de la Famille, de la Femme et du Développement social. En fait, Benkirane a annoncé, lors des travaux du premier Forum d’emploi des personnes souffrant de handicap tenu avant-hier à Casablanca, que ce dossier pourrait connaître une avancée avant la fin de l’année législative. Des propos en totale contradiction avec ceux tenus par Bassima Hakkaoui qui a déclaré, il y a plus d’un an à la Chambre des représentants, qu’il était impossible de réserver 7% des postes de la Fonction publique à cette catégorie de Marocains comme l'exigeait un arrêté de l’ex-Premier ministre Abbas El Fassi datant de 2010 et  qu’elle comptait réviser cet arrêté en vue de sa « clarification ».
La ministre avait également fermé la porte du recrutement direct en faveur des handicapés, étant entendu que, jusqu’à présent, il n’existait aucun mécanisme spécifique et harmonisé de compensation du handicap et que l’accès des personnes à besoins spécifiques aux dispositifs de protection sociale restait problématique.
Qui faut-il croire ? Le chef du gouvernement ou sa ministre ? Il n’en demeure pas moins que la déclaration de Benkirane  n’est pas tout à fait claire et qu’elle sème même le trouble. En fait, ce dernier a indiqué que l’application du quota de 7% reste difficile à réaliser vu les nombreuses entraves qui  gênent sa mise en place. Notamment celles relatives aux aspects juridiques, au ciblage des personnes concernées et à la classification des handicaps.   
En d’autres termes, l’éventualité d’accéder à la Fonction publique demeure une simple promesse. Et en attendant, les personnes souffrant de handicap continuent à souffrir le martyre pour  accéder au marché du travail puisqu’elles demeurent exclues des circuits ordinaires menant vers l’emploi et  qu’elles ne parviennent pas à avoir des rémunérations correctes sans parler du fait qu’elles ne peuvent pas bénéficier des garanties légales  et sociales dont jouissent, en principe, les autres citoyens.
Des promesses qui en disent long sur le prétendu amour et la soi-disant compassion de Benkirane à l’endroit de ces personnes et de leurs souffrances. Ils en disent également long sur le genre de larmes qu’il a versées en juillet dernier sous la Coupole.  « Je peux vous dire que je connais la question du handicap plus que vous tous… Des mères viennent chez moi, portant des enfants qui souffriront jusqu’à la fin de leurs jours», avait-il lancé aux députés réunis dans le cadre de la séance mensuelle des questions de politique générale.
Pourtant, cet homme qui avait  des trémolos dans la voix  tellement la situation des handicapés semblait l’émouvoir n’a rien fait de concret pour cette catégorie de Marocains. En effet, hormis quelques avancées au niveau législatif, le bilan de son gouvernement demeure nul, deux années après le lancement de la nouvelle stratégie concernant ces personnes annoncée en grande pompe par Bassima Hakkaoui.
Cette dernière avait annoncé en  2013 une feuille de route en six étapes, à savoir   l’élaboration  d’une politique publique au service des droits des handicapés ; la promulgation d’une loi sur les droits des personnes souffrant de handicap, la réalisation de la deuxième étude sur le handicap au Maroc ; l’implantation auprès des délégations de l’Entraide nationale de 16 unités régionales dédiées à l’accueil et à l’orientation des personnes en situation de handicap; l’exécution du programme sur l’accessibilité en partenariat avec la Banque mondiale et enfin la mise en œuvre du Fonds d’aide sociale. Mieux,  elle avait même affirmé qu’elle comptait plaider pour une intégration de la dimension «handicap» dans les politiques publiques et qu’elle prévoyait aussi de tout entreprendre pour faire promulguer  « la loi portant consolidation des droits des personnes en situation de handicap».  
Ainsi, si l’Exécutif a bien fini par adopter le projet de loi-cadre relatif à la protection et la promotion des droits des personnes handicapées, il n’en demeure pas moins que ce texte n’a pas été du goût de tous les acteurs associatifs œuvrant dans le domaine. Mais il n’y a pas que le volet réglementaire qui traîne le pas, l’étude sur le handicap le fait  également. Depuis l’enquête menée en 2004 et les schémas directeurs du handicap au niveau régional censés définir les priorités stratégiques devant guider les actions de l’ensemble des acteurs, aucune étude d’envergure nationale n’a été réalisée. Un même constat d’échec a été relevé concernant  l’implantation auprès des délégations de l’Entraide nationale de 16 unités régionales dédiées à l’accueil et à l’orientation des handicapés et l’exécution du programme sur l’accessibilité et la mise en œuvre du Fonds d’aide sociale.  
Pour Mohamed Al Azri, président de la «Coalition régionale pour la protection des droits et de la citoyenneté des personnes handicapées» de la région de Casablanca, le gouvernement pèche par l’absence d’une approche globale et intégrée de la question du handicap. « Ce dossier ne peut être traité que dans ce cadre. Il ne doit pas être confié à un seul ministère mais à l’ensemble des départements ministériels. D’autant que les dispositions de la  Constitution ainsi que les conventions internationales exigent une approche axée davantage sur les droits », nous a-t-il précisé.   Et d’ajouter : « L’Exécutif peut procéder par des mesures simples et financièrement pas très coûteuses.  Tel est le cas de la révision du Dahir relatif aux assurances. Idem pour la rationalisation des ressources financières existantes».  D’après lui, les projets initiés dans le cadre de l’INDH ou ceux financés par les allocations du ministère de tutelle ou de l’Agence de développement social doivent être conçus dans une approche globale et intégrée basée sur le suivi et la reddition des comptes.  Des exigences qui risquent de rester lettre morte faute  de gestionnaires qualifiés et de compétences spécialisées dans le domaine.


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