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Le PLF se veut social mais l’est-il vraiment ?


Hassan Bentaleb
Jeudi 19 Octobre 2017

Quid de la création d’emplois ?
De l’amélioration du pouvoir d’achat ?
Et de ce fameux ISF qui tarde à montrer le bout du nez ?


«Tendanciel, conservateur et orthodoxe », c’est ainsi que Hicham Attouch, professeur d’économie à l’Université de Mohammed V de Rabat a qualifié le Projet de loi de Finances (PLF) 2018 adopté en  Conseil de gouvernement, mardi.  Pour lui, ce projet a été conçu dans  la même ligne tracée par les gouvernements précédents. « Il n’y a pas de nouveautés. Nous sommes face à un PLF qui prévoit un scénario tendanciel qui n’est ni optimiste ni pessimiste.  Une situation qui trouve son explication dans les orientations induites par les principales stratégies sectorielles qui constituent l’ossature  fondamentale du budget de l’Etat », nous a-t-il expliqué.  
Ainsi si le PLF 2018 table sur un taux de croissance de 3,2% et prévoit de contenir le déficit budgétaire à 3%, notre source estime que ces pronostics demeurent incertains vu  l’état de sécheresse qui perdure jusqu’à aujourd’hui. Selon elle, le taux de croissance à 3% est tributaire d’une campagne agricole, au moins,  moyenne. Et cette dernière est conditionnée par une pluviométrie qui ne s’annonce pas de bon augure. Même évaluation concernant le déficit budgétaire à 3%. Hicham Attouch pense qu’il faut relativiser ce taux vu que celui de l’endettement public a atteint  les 84% du PIB. « Ce taux a augmenté au bout de 10 ans, et il très élevé par rapport au standard international qui est de 60%. La vraie question aujourd’hui est de savoir si on va toujours contenir le déficit budgétaire à 3% au détriment des générations futures », s’est-il demandé.
Concernant la création de 19.000 postes d'emploi et les 20.000 autres qui le seront par contrat au ministère de l'Enseignement, le PLF compte également porter le budget alloué à ce dernier secteur  à 59,2 MMDH, en hausse de 5 MMDH par rapport à 2017, alors que celui de la santé verra son budget fixé à 14,79 MMDH en sus de la mobilisation de plus de 4.000 postes d'emploi, notre source se demande si la contractualisation peut être vraiment assimilée  à une  création de postes budgétaires. « L’emploi dans le secteur public a toujours  été fondé sur la création de postes budgétaires et de CDI alors que la contractualisation est basée sur des CDD. Et tout dépend du secteur dans lequel cette contractualisation sera appliquée. Est-ce que sa mise en place dans le secteur de l’enseignement correspond  réellement au contenu des directives Royales qui ont insisté sur le fait que ce secteur a besoin d’une véritable réforme ?  Et ce n’est pas avec des contractuels qu’il pourrait retrouver des couleurs  notamment au niveau du primaire et du secondaire », nous a-t-elle  indiqué. Et de poursuivre : « Il faut également  préciser que les secteurs sociaux ont toujours bénéficié d’un budget avoisinant les 57%  et les dernières hausses des fonds alloués à la santé et à l’éducation ne font, en réalité, que prendre la place des dotations supplémentaires d’investissement enterrées en 2014 ».
S'agissant du programme de lutte contre les disparités territoriales destiné au milieu rural, le PLF annonce que les crédits de paiement seront de l'ordre de 3,54 MMDH, alors que les crédits d'engagement s'élèveront à 4 MMDH. « Les 3,54 MMDH ont été annoncés  sans précision de leur destination ni le département qui sera  charge de les dépenser. Et du coup, il est difficile de se prononcer sur ces montants ni de savoir s’ils sont judicieux ou pas.  En fait, il se peut que ces fonds soient destinés  au Compte spécial relatif au développement rural et des zones de montagnes  alors que ce dernier dispose déjà de 2 MMDH. Ceci d’autant plus que le fait d’avoir programmé ces 4 MMDH d’engagement n’a rien de nouveau ».
Evoquant les mesures spécifiques à la promotion de l'investissement privé et de l'emploi dont celle du recours, pour la première fois, au tableau progressif en matière d'impôt sur les sociétés (IS), notre économiste estime que la graduation de l’IS n’est qu’une confirmation du fait qu’il y avait plusieurs taux d’imposition. Mais, il se pose des questions sur le palier  à partir duquel on peut considérer cette graduation comme une bouffée d’oxygène pour les PME. Ceci d’autant plus que le règlement de l’IS bénéficie d’un différé d’exercice.
Pourtant, Hicham Attouch pense que l’essentiel n’a pas été pris en compte, à savoir l’Impôt sur la fortune puisque le PLF n’évoque pas cette question. Et il va plus loin en estimant que les incitations et les exonérations fiscales mentionnées dans le PLF ne concernent que les entreprises et ne touchent quasiment pas les ménages. «  Les mesures programmées au profit de ces derniers sont dérisoires alors qu’il y a un vrai problème de pouvoir d’achat. On ne parle que de l’aide à l’entreprise mais qu’en est-il de l’appui destiné aux familles ? », se demande-t-il.
Notre source est catégorique. Le PLF 2018 n’apporte rien de novateur en matière de mobilisation des ressources financières. Et ce n’est pas une surprise, estime-elle, puisque, depuis des années, l’Etat suit une politique budgétaire très orthodoxe. « Il se concentre sur la fiscalité et  les dettes et n’apporte pas de solutions novatrices  ni up-to-date   comme cela a été le cas concernant l’éducation, la santé ou l’eau. Un budget doit être en adéquation avec les problèmes qui ont été pointés du doigt  par S.M le Roi, le HCP et les mouvements sociaux qui ont secoué certaines régions du Maroc», a-t-elle conclu.


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