“Le Ciel attendra” Un film choc sur la radicalisation des jeunes

Près de 9.300 personnes sont recensées en France pour "radicalisation violente"


Mehdi Ouassat
Samedi 27 Août 2016

Le long métrage, présenté jeudi au Festival
du film francophone d'Angoulême, est une
œuvre coup de poing sur des jeunes filles
décidées à rejoindre le groupe Etat islamique.



Ce film de la Française Marie-Castille Mention-Schaar, projeté en avant-première à Angoulême avant d'être présenté au Festival international de Toronto (8-18 septembre), raconte le parcours de Sonia (Noémie Merlant), 17 ans, et Mélanie (Naomi Amarger), 16 ans. L'une s'apprête à participer à un attentat après avoir échoué à partir en Syrie, tandis que l'autre tombe amoureuse d'un prince charmant rencontré sur les réseaux sociaux, qui va l'embrigader. Tombant des nues, leurs mères, interprétées par Sandrine Bonnaire et Clotilde Courau, vont tenter d'agir.
Fiction nourrie par un gros travail d'enquête, le film, attendu en salles en octobre prochain, est né d'un questionnement de la cinéaste: "Comment aujourd'hui une adolescente peut passer d'une vie normale à un moment où elle est prête à tout quitter pour partir en Syrie?", a-t-elle confié à l'AFP. "Je ne voulais pas aborder ce sujet en restant à la périphérie. Je voulais pouvoir rencontrer des filles qui racontent ça avec leurs mots, leurs sensations, leur vécu", ajoute la cinéaste, qui avait signé en 2014 "Les Héritiers", sur une classe en difficulté qui passe un concours d'Histoire.
Pour "Le Ciel attendra", elle a rencontré Dounia Bouzar, directrice du Centre français de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam (CPDSI), qui dit avoir déradicalisé quelque 1.000 jeunes. Elle l'a suivie pendant trois mois, rencontrant avec elle une trentaine d'adolescents. "Plus je rentrais dans le sujet, et plus je trouvais qu'il y avait une urgence. A un moment donné, je me suis dit «il faut que je fasse ce film, c'est maintenant qu'il faut en parler»", dit-elle.
Si "Les Cowboys" de Thomas Bidegain et "La Route d'Istanbul" de Rachid Bouchareb se sont intéressés dernièrement au jihad, ils l'ont fait du point de vue de parents dont les enfants sont partis en Syrie. Marie-Castille Mention-Schaar dit elle avoir voulu se concentrer sur les jeunes, pour que "le spectateur ressente le plus possible comment ça pouvait se passer". "Ce qui m'intéressait, c'est l'adolescence, ces espèces de sables mouvants où une mauvaise rencontre peut vous faire mal tourner. Mais là, il y a un réseau qui est tellement fort en face que c'est comme un vampire qui ne vous lâche plus", souligne-t-elle. Le parcours de ces jeunes filles de milieux différents --l'une a un père d'origine musulmane, l'autre non--, est minutieusement retracé, de leur embrigadement aux tentatives menées pour les déradicaliser.
Sonia Bouzar joue dans le film son propre rôle, animant des groupes de parole et des séances avec des jeunes. "Le Ciel attendra" cueille le spectateur par la force de son sujet, tandis que la construction du film entretient le suspense, donnant parfois à l'ensemble des allures de thriller. Avec ce film, dont le tournage a commencé deux jours après les attentats du 13 novembre à Paris (130 morts), la cinéaste espère que les spectateurs puissent "mieux comprendre" la radicalisation jihadiste.
Car "plus on comprend, plus on est armé pour réagir", dit-elle. Selon des chiffres officiels publiés en mai, près de 9.300 personnes sont recensées en France pour "radicalisation violente", dont 30% de femmes et 20% de mineurs.


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