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La réforme de la justice passe par celle de la politique pénale

Elargir le champ des libertés individuelles tout en faisant avec le référentiel islamique.Tout un chantier


Hassan Bentaleb
Dimanche 29 Décembre 2019

Un corpus juridique désuet, une inflation des textes pénaux, une prédominance de l’approche pénale, une multiplication des affaires présentées devant les tribunaux, une hausse du taux de récidive, une augmentation du nombre de détentions provisoires, etc. C’est ainsi que Mohamed Benabdelkader, ministre de la Justice, a décrit la politique pénale marocaine lors de son intervention devant le Conseil de gouvernement tenu jeudi dernier. Selon lui, il y a des failles dans la pratique judiciaire qui imposent une intervention législative. Mais, qu’en est-il de l’issue du dialogue national relatif à la réforme du système judiciaire ou du projet de Code pénal présenté devant le Parlement il y a près de quatre ans?«Il y a eu un débat public sur la réforme du système pénal qui a fait le tour de la question et qui a vu l’implication de tous les acteurs concernés. Il y a eu aussi élaboration d’un projet de loi, mais ce dernier sommeille encore dans les tiroirs du ministère de la Justice et il n’a pas encore été transmis au Parlement», nous a indiqué Samir Aït Arjdal, président du Centre marocain du traitement législatif et la gouvernance judiciaire. Et de poursuivre : « Aujourd’hui, le problème se trouve au niveau du ministère de la Justice et du Parlement. Mais, la vraie question est de savoir s’il y a une réelle volonté gouvernementale de mettre en place cette réforme ou pas, d’autant que ce dossier est d’actualité au regard de l’importance du débat public national le concernant, l’évolution de la criminalité et la nécessité de mettre les lois au diapason des faits sociaux. Aujourd’hui on vit un véritable vide juridique». Mais, ce retard enregistré en matière de réforme de la politique pénale est dû également, selon notre source, au débat de société entre les modernistes et les conservateurs sur la forme à donner à ce corpus législatif. « Les références islamique, constitutionnelle et des droits de l’Homme constituent la source des législations nationales. Le problème réside aujourd’hui dans la conformité entre elles ; c’est-à-dire comment produire un texte de loi moderne qui répond, en même temps, aux principes constitutionnels sans porter atteinte au référentiel islamique », nous a-t-elle précisé. Et d’ajouter : « Les crimes à caractère moral (IVG, adultère…) constituent un exemple illustratif de ce débat de société entre ce qui est religieux et ce qui ressort des droits de l’Homme.Ce débat pourrait figurer parmi les obstacles qui ont retardé la promulgation du nouveau texte pénal. En effet, la société marocaine est divisée entre ceux qui sont contre et ceux qui sont pour et chaque camp a sa propre interprétation des droits et des libertés. La libération de la journaliste Hajar Raissouni qui a été condamnée à un an de prison pour avortement illégal, peut être interprétée comme un signe politique appelant à un élargissement des libertés sans toucher à l’islam ». Faut-il s’attendre à une réforme pénale au cours de l’année prochaine ? Samir Aït Arjdal estime que cette réforme s’impose avec acuité vu que l’année prochaine sera l’année des préparatifs des élections législatives de 2021. Mieux, notre interlocuteur pense que cette urgence est des plus nécessaires vu la dynamique qui traverse la société marocaine. D’après lui, le législateur doit intervenir pour encadrer cette dynamique avant qu’on aille droit dans le mur. « L’indépendance du pouvoir judiciaire constitue actuellement un enjeu puisqu’elle demeure incomplète. En effet, depuis 2011, on parle de cette indépendance sans promulguer les lois y afférentes (Code de procédure pénale et civile, Code pénal …). L’absence de ces lois porte également tort aux juges qui sont souvent critiqués à cause de la hausse des cas de récidive et du surpeuplement des prisons, mais est-ce que les juges ont-ils à leur disposition des textes qui leur offrent des alternatives à la détention ou des procédures flexibles ? », a-t-il conclu. 


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