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La chasse aux cafés à chicha reprend de plus belle

Plusieurs estaminets inquiétés


Meyssoune Belmaza
Mardi 26 Août 2014

La chasse aux cafés à chicha reprend de plus belle
Dans certaines villes du Maroc, plusieurs cafés à chicha ont été inquiétés dernièrement. Plus de peur que de mal, diront certains avertis, qui se souviennent encore d’une montagne d’opérations quasi similaires enregistrées il y a une dizaine d’années, et qui au final, avait accouché d’une souris. C’est dire qu’à Casablanca, malgré quelques récentes descentes musclées au niveau de quelques établissements, les autorités marocaines continuent à ne pas, réellement, piper mot face à la pipe à eau.
Cette dernière, pour rappel, a marqué ses premiers pas sous notre ciel marocain depuis le début des années 90. Suivant les traces de cet art de vivre à tendance orientale, une bonne partie de Marocains s’est vite retrouvée accro.
Loin d’être inoffensive pour la santé, cette pratique est certes «tolérée» mais de temps à autre, des circulaires d’interdiction émergent inopinément. Munis de paperasses officielles et appuyés d’expression stalinienne, les limiers de la police commencent ainsi à chasser. L’une des dernières en date a concerné le quartier Moulay Rachid. En effet, ce sont pas moins de quatre cafés situés aux boulevards Driss El Harti, les Forces Auxiliaires, Mohamed Ameziane et au quartier Essadri, le tout relevant de la préfecture de Moulay Rachid, qui ont fait, il y a quelques jours, l’objet de descentes policières qui se sont soldées, par l’arrestation de 73 personnes. D’après les éléments de la police, les prévenus sont tous des consommateurs de chicha dont quatre gérants écroués par la même occasion. Les mis en cause ont été présentés devant le procureur du Roi près le tribunal de première instance de Casablanca qui a relâché les consommateurs et a gardé en détention préventive les gérants. Dans la foulée, la police judiciaire du district de Moulay Rachid a saisi 60 narguilés et une grande quantité de «mâassal». En fait, depuis le début de l’année en cours, plus d’une dizaine de cafés ont été perquisitionnés au niveau du même district. 
Ces opérations, avait-on précisé à l’époque, ont permis l’arrestation de 108 personnes ainsi que la saisie de 16 plaquettes de chira et 144 chichas.  
D’aucuns s’interrogent sur la visée de cette campagne «massive» lancée contre les cafés: concerne-t-elle la consommation de chicha ou finalement de chira?
En tous cas, la confusion continue de régner en maître sur ce sujet, somme toute, banal dans d'autres pays mais qui est cloué au pilori dans le nôtre, et pour des raisons pour le moins obscures.
En effet, l’on se rappelle le contenu d’une ancienne décision relavant de la circulaire de la wilaya du Grand Casablanca qui interdisait clairement la consommation du narguilé dans les cafés et les lieux publics. Agé de dix ans, cet arrêté n°5 du 22 septembre 2004, décrété par l’ancien wali M’hammed Dryef et qui était censé mettre fin à un phénomène répandu au niveau de la capitale économique, n’est pas vraisemblablement appliqué dans les normes. 
Constat patent : la pipe à eau est vendue partout, alors que la circulaire d’application interdit que cette dernière soit servie dans les endroits publics, sauf dans les grands restaurants et les établissements touristiques autorisés à servir ce produit. Néanmoins, certains établissements ont balayé d’un revers de main cette décision du moment que la chicha pour eux est une sorte de manne qui leur permet d’engranger facilement des recettes faramineuses. 
Néanmoins des questions demeurent équivoques : cet arrêté a vu le jour pour dorer la pilule ou pour être appliqué dans les règles de l’art ? Et comment peut-on interdire aux cafés de commercialiser le narguilé alors qu'il est vendu légalement dans tous les bureaux de tabac avec, qui plus est, l'accord de l'Etat, dont il jouit des recettes fiscales afférentes? Les dés sont-ils pipés?
Pour rappel, Altadis (3e fabricant de cigarettes en Europe occidentale), qui est une société étrangère détenant le monopole de distribution de tabac au Maroc, avait mis en vente dans les bureaux de tabac une pièce maîtresse dans la confection des chichas. 
Dans l’attente de comprendre quel est l’intérêt de ces moult opérations de coups de poing contre quelques cafés; et pour quelle raison d’autres sont incontestablement épargnés, il est judicieux de mettre l’index sur la problématique du risque sanitaire du phénomène.
En effet, les professionnels de la santé insistent pour expliquer que la «chicha» contient 4.000 matières toxiques. Ils ajoutent que la combustion douce du tabac du narguilé, qui dure 60 minutes, contre 5 minutes pour la cigarette, génère plus de monoxyde de carbone et de goudron. L’analyse chimique de la fumée de la pipe à eau a montré que les taux de nicotine, de goudron, de phénols sont inférieurs à ceux de la cigarette, mais la fumée du narguilé contient 10 fois plus de monoxyde de carbone (CO), connu pour engendrer de graves complications cardiovasculaires et cérébrales. Avis donc aux férus de la chicha, vous êtes exposés au charbon utilisé qui dégage du monoxyde de carbone (CO). Ce gaz se fixe à l’hémoglobine à la place de l’oxygène et c’est ainsi que l’hémoglobine véhiculée par le sang va apporter aux différentes cellules de l’organisme du monoxyde de carbone plutôt que l’indispensable oxygène. Cette pipe à eau, martèle-t-on, cause les mêmes maladies que celles provoquées par la cigarette : cancer du poumon, du larynx, bronchites chroniques, maladies cardiovasculaires, tuberculose, en plus des herpès d’origine virale et des hépatites…Et la liste est loin d’être exhaustive avec les risques de transmission encourus de maladies par l’eau et d’une mauvaise hygiène bucco-dentaire, conséquente au partage du narguilé. 
La consommation de la chicha est donc une réelle plaie purulente qui doit être prise à bras-le-corps par le gouvernement avant de tomber dans des problèmes de santé publique. Au Maroc, dans notre plus beau pays du monde, éradiquer la vente et la consommation de la pipe à eau doit figurer dans le pipe des pouvoirs publics, toutes considérations incongrues mises à part. 



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