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La Banque mondiale traduite en justice à Rabat

Trois chercheurs marocains l’accusent de falsification de données


Mourad Tabet
Mercredi 25 Décembre 2013

La Banque mondiale traduite en justice à Rabat
La Banque mondiale est dans le collimateur. Trois chercheurs marocains ont décidé de saisir la justice marocaine pour  « falsification » de données. Il s’agit en l’occurrence des professeurs de l’Institut agronomique et vétérinaire Hassan II de Rabat : Najib Akesbi, Driss Benatya et Mohamed Mahdi.
Selon un communiqué de presse parvenu à « Libé », maître Abderrahim El Jamai a saisi le tribunal de première instance de Rabat « dans le cadre d’une affaire tout à fait emblématique, alors que, jusqu’à présent, cette institution internationale faisait croire qu’elle bénéficiait de l’immunité diplomatique conformément à la Convention des Nations unies de 1947».
Les trois chercheurs marocains étaient chargés, dans le cadre d’un programme intitulé RuralStruc, de réaliser une étude sur les « implications structurelles de la libéralisation pour l’agriculture et le développement rural».
« La première phase avait été réalisée dans le cadre d’un contrat de recherche avec notre employeur, l’Institut agronomique et vétérinaire de Rabat, principal établissement d’enseignement et de recherche agricoles du pays. Cette phase s’est bien déroulée, et le rapport que nous avions rédigé à cette étape du programme a été si bien accueilli par les milieux des chercheurs et experts intéressés, que nous en avions décidé la publication, sous forme d’un ouvrage collectif », ont expliqué les chercheurs. Mais  la deuxième phase a tourné « au cauchemar ». « Confiée à un bureau d’études privé pour la réalisation de la partie opérationnelle (enquête de terrain et traitement des données collectées), cette phase n’a pu être conduite à son terme dans les conditions de fiabilité et de professionnalisme nécessaires ». 
Les trois chercheurs se sont donc insurgés contre les carences de l’étude entreprise au titre de la deuxième phase. « Face à notre refus de nous plier à une aussi dangereuse dérive, le bureau d’études, en connivence avec ses donneurs d’ordre de la Banque mondiale, s’est permis de résilier unilatéralement notre contrat, puis de livrer le rapport que nous avions rédigé, mais après l’avoir «arrangé» conformément aux vœux de ses commanditaires », ont-ils martelé.
Après plusieurs démarches, les chercheurs ont décidé de saisir la justice et leur choix s’est porté sur maître Abderrahim Jamaï.Ce dernier nous a expliqué que les décideurs de la Banque ont refusé à plusieurs reprises de comparaître devant la justice marocaine au prétexte que cette institution jouissait de l’immunité diplomatique. Mais après plusieurs recherches, cet ex-bâtonnier a découvert qu’en 2003, la Banque mondiale est devenue justiciable devant les tribunaux des pays où elle disposait de représentations, et ce grâce à un amendement de ses statuts. 
Selon le communiqué de presse afférent à cette affaire, « un certain nombre de pays, notamment africains, avaient déjà saisi la justice à la suite de «programmes» que la Banque mondiale leur avait imposés et dont les conséquences économiques et sociales se sont révélées catastrophiques pour leurs peuples. On compte en particulier de nombreux différends liés à la question de la « dette odieuse » accumulée par ces pays et gaspillée dans des projets qui ont aggravé le sous-développement et la pauvreté. Seulement, la Banque mondiale s’est toujours protégée derrière sa prétendue immunité diplomatique. C’est ce « tabou » qui vient de tomber avec la comparution du représentant de la Banque mondiale devant le tribunal de première instance de Rabat ».
« Le fait que l’avocat de la Banque mondiale ait comparu devant le tribunal lors de la première audience le 19 du mois courant, signifie que les décideurs de la Banque reconnaissent qu’elle peut être poursuivie devant la justice, contrairement à ce qu’ils prétendaient auparavant », a précisé Me Jamaï dans une déclaration à Libé. 
Selon lui, cette affaire et quel que soit son aboutissement constitue « une première dans les annales de la justice marocaine et constitue un antécédent qui permettra à l’avenir à toute organisation marocaine de mettre en cause les recettes et les politiques de la Banque mondiale en la traduisant  devant la justice». 
La deuxième audience de cette affaire sera tenue le mois de janvier prochain.
 


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