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L’aéroport de Roissy, destination pour vagabonds sans billet


AFP
Samedi 28 Février 2015

L’aéroport de Roissy, destination pour vagabonds sans billet
Au milieu des passagers, Ali est assis dans le terminal 2. Son chariot est rempli de valises et de sacs mais il ne prendra pas l’avion, il vit ici, comme une centaine d’autres sans-abri échoués à l’aéroport parisien de Roissy.
Dans les couloirs de cet aéroport, le deuxième d’Europe avec plus de 63 millions de passagers par an, ils évitent les regards et se fondent dans la foule. Passant presque inaperçus. 
Ali, qui dit avoir 52 ans, ne se souvient pas comment il a atterri dans cet aérogare où il squatte depuis plus de deux ans. Tunique longue, doudoune et bonnet sur la tête, il raconte dans un grand sourire, qui laisse entrevoir une pièce de 5 centimes qu’il a coincé entre ses dents, ses journées de lectures et de prière.
“Je dors pas beaucoup, c’est difficile sur les sièges. Mais je suis tranquille ici”, confie cet homme qui se présente comme un Français né en Inde. Sur le chariot qui ne le quitte jamais, un amas de sacs et de vieilles valises. Mélange de souvenirs d’une vie passée et d’objets trouvés à l’aéroport.
En bout de ligne d’un train de banlieue, à une trentaine de kilomètres de Paris, Roissy-Charles-de-Gaulle est un point de chute pour de nombreux sans-abris, au même titre que d’autres lieux publics, mais plus discret. Chauffage à tous les étages, sanitaires, générosité de certains voyageurs et commerces à proximité.
Anthony Burt, coordinateur des équipes mobiles de la Croix-Rouge à Roissy, connaît tous les recoins de l’aéroport qu’il sillonne matin et soir pour recenser les sans-abri, les aider et les emmener progressivement vers la réinsertion.  “Chaque mois, on rencontre entre 110 et 120 personnes et on essaye de créer une relation de confiance”, dit-il. “Ils ont tous des histoires différentes. On voit des hommes seuls, plutôt âgés, des femmes isolées, qui se sentent plus en sécurité que dans la rue, et des étrangers qui atterrissent ici et ne repartent pas”.Dans un local technique humide du sous-sol, Patrice, 44 ans, s’est recréé sa maison: un bric-à-brac de produits alimentaires, bouteilles d’eau et flacons de shampoing entamés, un micro-ondes et même un petit chauffage d’appoint.
“C’est fou la quantité de choses qui se jettent à l’aéroport”, dit cet homme qui reçoit en chaussons, montrant une pile de magazines, du foie gras ou un pot de harissa trouvés dans les poubelles.  Quand il a perdu son travail il y a sept mois, Patrice ne savait pas où aller. “C’est temporaire mais j’ai tout ce qu’il faut ici. Pour survivre, il faut une bonne hygiène et arrêter de boire”, se persuade-t-il.
“Un peu d’argent, un sandwich, du gel douche: la vie ici est plus aisée que dans une bouche de métro”, reconnaît Gisèle Rossat-Mignod, directrice des opérations à Roissy. “Mais on est éloigné de tout, certains vivent dans une grande précarité physique et psychologique.”
Conscient de ce “problème humain”, qui peut nuire à l’image d’un grand aéroport international, Aéroports de Paris (ADP) s’entoure depuis quelques années d’associations qui viennent en aide aux sans-abri. En 2011, elle a en outre décidé de fermer l’aéroport entre minuit et 4H00 par mesure de sécurité. “Un aéroport n’a pas vocation à héberger des SDF mais à accueillir des passagers dans des conditions optimales”, souligne Mme Rossat-Mignod, reconnaissant néanmoins une “tolérance”, notamment en période de grand froid.
En 2004, l’histoire du plus célèbre d’entre eux, le réfugié politique iranien Mehran Karimi Nasseri, qui a vécu plus de 18 ans à Roissy, a inspiré le film de Steven Spielberg “Le Terminal”. Aujourd’hui, il vivrait dans un foyer à Paris.
Ali, lui, ne se voit pas déménager. Sur son siège du terminal 2, il espère retrouver un jour un membre de sa famille qui vit dans la capitale et dont il dit avoir perdu l’adresse. 


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