Jack Lang : On ne peut concevoir le monde arabo-musulman sans les jardins


Propos recueillis par Youssef Lahlali
Samedi 30 Avril 2016

A l'occasion de la grande exposition organisée à l’Institut du monde arabe à Paris sur les Jardins d’Orient, Jack Lang, 
président de l’IMA, met l’accent, dans cet entretien, sur l’importance de cette manifestation qui devrait drainer un grand nombre de visiteurs. Tout en 
annonçant qu’une nouvelle exposition est prévue pour l’automne prochain sous le thème «Les épopées arabes sur les mers».  


Libé : Comment est née l’idée d’une grande exposition à l’Institut du monde arabe sur les jardins d’Orient ?
Jack Lang : Tout d’abord, je suis passionné des jardins. Quand j’étais ministre de la Culture, j’ai lancé une politique des jardins. J’avais observé que les architectes des monuments historiques s’intéressaient aux bâtiments mais pas aux jardins. Un jour, une tempête terrible s’est abattue sur Versailles et d’autres sites et des milliers d’arbres ont été déracinés. Je me suis rendu sur place. J’ai découvert des jardins historiques en friche. Ces jardins étaient aussi merveilleux que la Galerie des glaces. J’ai pris alors la décision   de nommer un architecte dédié aux jardins qui en a engagé la restauration.
Aujourd’hui en France, il y a un vrai amour pour les jardins. Je me trouve ici à l’IMA, j’estime que l’Institut doit s’intéresser à tout ce qui touche la science, la culture et le savoir ; rien de ce qui est beau ne doit être étranger à cette maison. En premier chef, parce qu’on ne peut pas concevoir le monde arabo-musulman sans les jardins. C’est l’histoire de ce monde que nous essayons de raconter. Il y a aussi dans l’exposition autre les jardins de Babylone, mythiques dans notre mémoire collective, perses et les jardins arabo-musulmans.
Les jardins du Maroc sont aussi très présents dans cette magnifique exposition, notamment les jardins de La Menara, Kasr Albadia
C’est tout à fait normal que le Maroc soit présent. C’est le pays qui a accueilli la civilisation andalouse. De ce fait, l’histoire du Maroc est unique et particulière ; elle est différente de celle de l’Algérie et de la Tunisie. Le Maroc n’a jamais  été occupé par les Ottomans. De nombreux facteurs ont fait que le Maroc depuis des siècles a conçu une architecture unique dans laquelle les jardins ont une place originale. Je suis très heureux que plusieurs jardins marocains soient présents dans cette exposition,  y compris le Jardin Majorelle qui, lui, n’est pas un jardin arabo-musulman. Ce jardin est une proposition contemporaine restaurée par Pierre Bergé. C’est une illustration, même s’il n’est pas arabo-musulman, d’une expérience marocaine de ceux qui ne sont pas marocains mais attachés au Maroc par les couleurs, les senteurs et la créativité de ce pays.
Vous avez évoqué le Jardin Majorelle, mais à l’époque du Protectorat français on remarque le retour des jardins de l’Orient mais avec des architectes et paysagistes occidentaux. Comment avez-vous montré dans cette exposition cet échange entre  l’Orient et l’Occident  dans ce domaine à travers l’exemple marocain ?
Le Protectorat à la différence du colonialisme, très dur et très destructeur comme en Algérie, a permis à des artistes, des créateurs et des inventeurs d’apporter leur touche et leur imagination. Par  ailleurs, les Marocains sont très accueillants et fidèles en même temps à leurs traditions ; ils aiment s’inspirer d’autres cultures. Lyautey a joué un rôle  particulier et  il y a beaucoup de choses à raconter là-dessus. Vous le connaissez mieux que moi. Au Maroc, on est dans une situation exceptionnelle. C’est pour cela qu’on a voulu que le Maroc occupe dans cette exposition une place exceptionnelle.
Quelle sera la prochaine grande exposition à l’Institut du monde arabe  après les jardins de l’Orient ?
La prochaine grande exposition aura lieu en automne, le titre n’est pas encore définitif «Les épopées arabes sur les mers» en particulier dans l’océan Indien et en Méditerranée. Beaucoup croient que  les Arabes c’est le désert point final, c’est idiot. Les Arabes ont aussi été maîtres des mers jusqu’aux XVème et XVIème siècles. Ce sera passionnant de raconter toutes ces aventures épiques. Il y aura du mouvement, de la vie et des découvertes !





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