Haro sur les taxes qui ruinent la santé


Par le Dr. Moulay Ahmed Idrissi Président de l’Association des amis des myasthéniques du Maroc
Mercredi 5 Août 2015

«La santé est un état de quiétude du corps et de l’esprit. La santé est l’âme du corps. La santé est la religion du corps ! Car c’est elle qui relie la vie et donc l’âme au corps. La médecine est le temple de cette âme ! La santé est le bien ultime de l’homme. Si l’âme relève de Dieu, la santé est y pour quelque chose ! La santé est le paramètre le plus important de la dignité. C’est sur ce point qu’elle allie politique et religion. La santé édicte selon cette même éthique des lois pour la sauvegarde des personnes et de l’espèce ! ». J’ajouterais, avec sagacité et persévérance, que la dignité de l’homme est dans sa santé. Sans santé, il n’y a pas de vie. Et quant à l’âme qui s’y accroche, elle relève de Dieu!
Il y a comme une arnaque à vouloir exploiter les tranches les plus affaiblies et à pérenniser des règlementations antisociales qui pénalisent les seuls malades. Oui les taxes sur les maladies pénalisent seulement les malades ! C’est inique, inhumain et antisocial. Les économistes qui ont inventé ces taxes dans d’autres pays, pour qu’ion les applique ici aussi, ont d’autres repères et assurances sociales qui rendent ces lois, stupides, plus supportables !
Ainsi, les gens en manque de santé, sont les seules franges dont on exploite les souffrances et les chairs ! Immoler la personne malade sur l’autel des taxes relatives la santé est illogique et absurde ! Il est déraisonnable de frapper les médicaments et les soins de fortes taxations ! Ces taxes usurpatrices sont une forme d’escroquerie légalisée, aveugle et pérenne. Elles laissent les régisseurs de passage, bloqués, incapables de réviser ces lois, fossilisées et insanes !
Continuer de faire payer des frais de douanes, abjects, sur les médicaments et leurs intrants, est une mesure machiavélique et impopulaire ! Ces surtaxes sont un frein institutionnel qui bride l’accès aux soins, restreint le pouvoir d’achat des familles et amoindrit celui des structures de santé publique et privés. Ces taxes rédhibitoires rendent automatiquement plus onéreux la technicité, la recherche, le diagnostic et les soins. Ces taxes pénalisent le budget du ministère de la Santé, avec un impact négatif sur ses hôpitaux. Leurs moyens, leurs prestations, leurs actes, leur efficience et leur disponibilité, on le voit, sont au quotidien affectés. Ces taxes représentent quand même, près du quart du budget. Et que dire  de la gouvernance?
«La médecine, dixit le professeur Chraïbi, n’est pas une science exacte.» La politique et les lois, non plus, dirons-nous! Même les lois bibliques connaissent, depuis leur écriture, la critique des faits et l’exégèse des hommes. Ces remises en question, humaines après tout, loin des bravades stériles et des tribunaux d’inquisition, se font de plus en plus prégnantes et pressantes. Sans avaliser les perversions, il est civiquement sain et licite de faire nos observations sur des lois que l’on dit sobrement «humaines»! Critique et logique, ont développé la connaissance des hommes depuis Socrate et Platon ! La médecine et la chimie ont opéré la suite ! L’homme moderne doit beaucoup à cette médecine des sages et à la civilisation musulmane qui en a véhiculé les progrès !
Sans les profaner, étant malgré nos faiblesses, les justes continuateurs de ces sages, ne soyons ni hautains ni impudiques dans notre ambition, encore moins complaisants entre nous ni obséquieux devant nos juges et nos dirigeants ! Mais disons-leur la vérité de nos sentiments et de nos peines, avec justesse et fierté, osons notre point de vue : la vérité ! La vérité sur les souffrances et sur nos épreuves de techniciens de la santé. Et cela, loin du rêve et de l’utopie, dans l’optique de solutions pragmatiques, réalisables, dénuées de toutes formes d’exactions inciviques. Parce que, d’abord, nous ne sommes plus sous le carcan décadent des colons et de leurs lois, ni comptables des mesures dégénérées anciennes !
Nous sommes souverains et libres d’opter pour des solutions de santé, généreuses et solidaires. Une réforme ! Comme le professe et le souhaite S.M le Roi, qui depuis son accession au Trône, mène une marche lumineuse et humanitaire, une marche exemplaire auprès des couches faibles et défavorisées.  Et ce par-delà les frontières avec un succès brillant et tant d’admiration. Ce très bel exemple doit nous inciter au changement et ne plus être placides à en devenir incompétents !
Cette sagesse et cette éthique, ce courage et cette proximité, sont l’esprit de notre programme. C’est le but de ce prêche médical, réquisitoire du pauvre et plaidoyer pour les malades, en faveur de la réforme de la santé et de ses moyens d’accès. Nous rendons grâce ici à l‘AAMM, aux doyens qui nous y honorent, aux circonstances qui nous ont décillé les yeux et permis de nous réveiller sur ces pratiques antinomiques et retorses et d’en fustiger les aspects rétrogrades. Nous sollicitons le réveil de tous les acteurs et les faiseurs d’opinion de la société. Nous revendiquons l’exonération totale de TVA sur la santé et aspirons à la suppression totale de la taxe de douane, à leur abrogation définitive. Tant sur les médicaments que sur les machines industrielles, tant sur les intrants et les réactifs, des labos et des hospices, civils et militaires, sur toutes les ''machines'' qui permettent d’explorer les maladies et de les traiter, qu’elles soient légères, graves ou handicapantes !
Les chercheurs, imbus d’une religieuse gloriole, que la science atavique, dans sa grandeur cerne d’une sacralité à crédit, diraient que c’est une honte de parler de la médecine comme d’un art ! Les concepts religieux n’en font pas un mystère, mais y donnent foi plus que dans les talismans. Les femmes en font une cuisine interne, quand les politiques se morfondent sur le trou béant où les plonge avec âpreté la Sécu ! N‘empêche que la médecine, bonne ou mauvaise, selon ceux qui l’administrent ou qui la reçoivent, a un prix ! Notion matérielle, galvaudée par ses détracteurs, mais cruelle et cynique pour les malades, graves ou légers, sans sensiblerie ni compassion superflue ! Ne serait-ce que pour parler du coût, des langueurs et des difficultés des études ! Ne serait-ce que pour  les coûts rendus accrus par l’achat de matériel, des instruments, des machines, des réactifs, qui sont à la base de la pratique et des soins. Ainsi pour le malade, tous les frais ne se résument pas au seul fait de l’achat du médicament ! Il y a un mot pour exprimer cette plainte : la souffrance, qui est synonyme de la fastidieuse, longue et stressante quête de son soulagement. Cesser de souffrir pour travailler et profiter dignement de la vie, telle est l’INDH de chacun.
Le magistère qui nous fait office de métier, cette gloriole qui a perdu de son fantasme édulcoré d’antan, contrit de concurrences déloyales et d’intrusions diverses, contraint le médecin à une intimité, professionnelle, serrée avec le malade ! Cette proximité et la raison de cette sympathie sont à l’origine du transfert des problèmes inhérents à l’accès aux soins sur le médecin ! C'est dire que nous sommes, nous les médecins, fiers disciples d’Hippocrate et de nos sages les plus anciens, viscéralement touchés par tout ce qui nuit à nos patients. Autant que leurs familles, sinon plus informés encore, de la profondeur des dols qu’ils supportent, parfois en les ignorant ! C’est dire aussi que l’impact du prix des soins est la condition sine qua non du maintien de la vie ! Dire «la vie », pour parler de la « maladie », c’est aussi une façon de parler de la mort, et de montrer le rôle de la « santé » dans le maintien de cette « vie », unique et non renouvelable, pour celui qui souffre ! Malgré les crédos des patients et leurs espérances !
Est-il utile de rappeler ces banalités ? Ces « mièvreries », que dépassent les gens nantis, ceux qui ont assez de lucre et d’insouciance, d’orgueil, d’oubli ou de distance spatio-temporelle, entre leurs beaux quartiers et les couches défavorisées? Est-il utile de rappeler les dures contraintes des médecins face à l’indigence des moyens où vit la majorité d’un peuple consumé qui les consulte? Est-il utile de rappeler aux gestionnaires leurs contraintes? Est-ce une offense que de vouloir changer les lois, quand elles sont injustes et implacables ?
Notre inconscience collective, annihilée ou blasée, par la chape des silences respectueux ou coupables, se complait dans l’habitude passée et le laxisme actuel. Le laisser-aller, qui nous fige, fait augmenter la facture des soins pour le sujet malade. La peur laisse ainsi bien du monde indifférent ! Les chercheurs plongés sur leurs oculaires, les enseignants occupés à plein temps, les cadres qui régissent les textes, restent ensemble et chacun dans ses arcanes, si ce n’est dans leurs tours d’ivoire. La pudeur des malades qui leur sont confiés, pour ne pas dire leur crainte et leur ignorance, ne les poussent guère au réveil !
 Sommes-nous inhibés devant ce besoin d’INDH sanitaire? Qui plus est, d’aucuns semblent paumés ou désintéressés,  inhibés sur ce registre, qui force leur silence ! Sauf cette exception que je salue ! Celle de la récente diminution des prix de certains médicaments. Même si elle n’est parfois que symbolique! Les décideurs, jusqu’à présent, quels que soient leurs programmes, libéraux ou socialistes, économistes et financiers, ne peuvent pas faire l’autocritique des budgets restreints qui leur sont alloués, par les finances publiques. L’argentier du Royaume ne peut pas, de lui-même, soustraire de ses rentes une rubrique (quoique inique) qui lui rapporte, sans la changer par d’autres revenus. Il faut donc l’éclairer et le lui demander ! Messieurs les ministres, réveillez-vous ! Nous requérons plus de civisme citoyen de votre part et plus d’engagement civique dans votre future loi de Finances. Qui osera le premier parmi vous, ouvrir cette nouvelle étape, cette réforme révolutionnaire humaniste, cet autre travail herculéen ? INDH sanitaire, salubre et humanitaire, à la fois démocratique, magistrale et révolutionnaire.
Et c’est avec espoir et gratitude, que ces mots aspirent à la plus haute des sollicitudes ! Un secours, une grâce magnanime qui n’est pas loin des bontés traditionnelles de nos bons et illustres Rois! Une faveur, qui ressemble à un acte de vérité, à un fait de justice, tiré de nos préceptes religieux et de nos convictions sociales. Un geste de noblesse et d’amour, qui puisse former des vœux que l’on sait inextinguibles !
Sauf que maintenant, les ministres reconnaissent que les malades savent qu’il est injuste, illégal, inique et malsain de faire payer aux gens leurs maladies et de les punir un peu plus, par des taxations sur les médicaments qu’ils se doivent de prendre ! Question de vie ou de mort ! Quand ils peuvent les acheter ! En vérité cet arbitraire, cette incurie subversive  poussent à la conscience du drame. La conscience du fait est prégnante chez tous les Marocains ! Ces taxes, cette pénalisation sont ressenties comme une véritable exaction, une punition collective, dans ce qui ressemble à une tutelle coloniale ! Une prédation tragique et une colonisation que notre indépendance n’a pas encore libérées ! En contrepartie, elle sensibilise et échaude les citoyens, responsables et administrés. Elle doit réveiller en eux un réflexe salvateur et identitaire, la solidarité ! Concept, fait de dignité retrouvée et de liberté, tel que assumé avec exemplarité et passion par notre Souverain qui régit et qui inculque les nouveaux concepts de droit et de devoirs, à commencer par ceux de l’Etat, de ses cadres et de leurs succès et de leurs obligations!
Nous sollicitons ainsi une réforme régalienne, une décision politique afin de remédier à cette plaie nationale. Nous en attendons, cette grâce illustre, intelligente et innovante. Nous espérons vivement qu’une décision, en émane, afin de reformater le fisc dans ses rapports avec le secteur des soins et celui des médicaments.
 


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1.Posté par DR IDRISSI MY AHMED le 04/08/2015 21:45
Bravo messieurs de Libération et de l'USFP

Votre militantisme est une force de proposition incontournable et efficace pour les progrès démocratiques au Maroc

Ceci, cet appel inlassable, est lancé en rappel à l'adresse de nos gouvernants et notre guide pour les malades marocains en premier
Recevez l’expression de la gratitude de l'AAMM qui a initié la bataille contre la cherté des médicaments et qui continue d’œuvrer, avec vous, pour demander à l'Etat la suppression des taxes indirectes sur les maladies
Outre le patient, couvert ou pas, cette réforme fiscale est au bénéfice de tous les secteurs de la santé, dont le Ministère et les Caisses Mutuelles

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