Hamada Eddarouich : Le Polisario n’agit que par procuration d’Alger

La solution de l’affaire du Sahara marocain est entre les mains de l’Algérie


Entretien réalisé par Ahmadou El-Katab
Samedi 21 Octobre 2017

 Jusqu’à son retour à la mère patrie en 2008, Hamada Eddarouich
était l’un des principaux bailleurs de fonds du
Polisario et l’un de ses plus  importants soutiens en
territoire mauritanien. Convaincu par le discours de Sa Majesté le Roi
annonçant l’autonomie des provinces marocaines du Sahara comme solution
à ce dossier, il a organisé le congrès de Gjeijimat
et le premier ralliement massif de l’histoire.
En ralliant la patrie, Hamada Eddarouich
avait abandonné plusieurs propriétés et une fortune colossale en Mauritanie
où il avait occupé plusieurs postes de responsabilités
10 ans après, il a décidé de se rendre en visite familiale au Pays d’un million de poètes. Cette nouvelle
a suscité des rumeurs dans différents milieux. Libé
l’a rencontré pour tenter
de comprendre les causes de  ces rumeurs.


Libé : Plusieurs médias mauritaniens ont relaté votre voyage comme s’il s’agissait d’un retour définitif en Mauritanie. Qu’en est-il ?
Hamada Eddarouich : (Rire)
D’abord, je remercie ces médias pour avoir accordé autant d’importance à mon voyage. Je les remercie, également, pour les gratifications et les qualificatifs qu’ils m’ont donné (homme d’Etat, bête de la politique, etc.). Je sais que la presse, en général, est friande de scoop et d’inédits. 10 ans après avoir regagné le Maroc, je me rends compte que la majorité des observateurs n’ont pas compris la portée de mon action et l’intérêt qu’elle représente pour ceux concernés par l’affaire du Sahara. Je ne me suis pas déraciné, je n’ai pas tout abandonné pour un caprice ou un jeu d’enfant. Le problème est sérieux. Il est douloureux et engage l’avenir de la sous-région. Mon retour au Maroc a été mûrement réfléchi. Je connais parfaitement l’histoire du Maroc, l’histoire du Sahara et ses populations. J’ai vécu son actualité, ses joies et ses douleurs. Cela fait plus de quarante ans que nous vivons des malheurs au quotidien. Il est temps que ce calvaire cesse. Les concepts ont évolué. Le monde est devenu un village. Les blocs ont disparu avec la fin de la guerre froide. Les grandes puissances renoncent à leur souveraineté pour s’unir avec de petits pays. Par conséquent, la seule solution qui s’offre à nous, la plus juste, la plus viable et la plus facile à mettre en œuvre, est celle préconisée par le Maroc :  une autonomie large sous la souveraineté marocaine. Je considère que cette proposition est une aubaine, un don d’Allah et c’est pourquoi je l’ai embrassée. Avant de regagner le Maroc, j’ai discuté avec de nombreux responsables sahraouis et je sais que la majorité d’entre eux, pour ne pas dire la totalité accepte cette solution. Il n’y a que le diktat de l’Algérie qui empêche sa mise en place. Depuis dix ans, mes convictions restent inchangées.
Pour répondre à votre question, mon retour définitif, je l’ai fait il y a de cela dix ans. Je ne me renie pas et j’en suis fier. Je vais en Mauritanie en visite privée et familiale et je serai de retour chez moi, à Agadir dans une quinzaine de jours. Inchaa Allah.

Les relations maroco-mauritaniennes  traversent une phase délicate. Qu’en est-il exactement ?
Les relations entre le Maroc et la Mauritanie sont des relations entre frères. Tous les Mauritaniens ont de la famille au Maroc et vice-versa. Ces relations sont beaucoup plus fortes et plus profondes que de simples rapports de chancellerie. Je ne me fais aucun souci sur l’avenir de ces relations familiales. Les interférences extérieures provoquent parfois des perturbations légères et passagères. Ni plus ni moins. J’ai déjà écrit dans des articles et dit dans des interviews qu’il faut décomplexer les relations entre deux frères voisins et que la Mauritanie est éminemment importante pour l’équilibre sous-régional. De par son histoire, sa sociologie, son rayonnement culturel, sa situation stratégique, son caractère de trait d’union entre l’Afrique noire et l’Afrique du Nord, la Mauritanie est un Etat extrêmement important.

La situation étant ce qu’elle est, comment sortir de l’impasse et mettre fin au conflit artificiel créé à propos de nos provinces sahariennes ?
Le Polisario agit par procuration. Je considère que l’Algérie est un pays important : un vaste territoire, une grande population, des ressources naturelles importantes, des frontières communes avec tous les pays du Maghreb. Mais tous ces atouts ne doivent pas être exploités pour déstabiliser toute la sous-région à des fins de leadership.
Cela dure depuis plus de quarante ans et les  opportunités  avortées sont immenses pour tous les pays de notre ensemble et au-delà. Il faut que l’Algérie revienne à la raison et permette aux Sahraouis de rentrer chez eux et parachever leur autonomie dans le cadre d’un Maroc démocratique. A partir de là nous construirons le Maghreb arabe pour l’intérêt des peuples.
Mon combat personnel s’inscrit dans cette logique et il n’est pas question pour moi de revenir en arrière. J’espère me faire  comprendre.

Selon la presse mauritanienne, vous méritez plus de la part du Maroc. Qu’en pensez-vous ?
Mon ralliement au Maroc n’a jamais été dans le cadre d’une opération commerciale. J’ai regagné le Maroc par conviction et je n’ai jamais exprimé mon insatisfaction. J’ai été bien accueilli, bien traité, bien respecté et je suis parfaitement à l’aise. Les postes de responsabilité, je les aurais, le moment venu, inchaa Allah.


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