Entretien avec Neila Tazi : La musique gnaoua et la magie d'Essaouira sont au cœur de ce festival


Propos recueillis par Abdelali Khellad
Jeudi 29 Juin 2017

Parlementaire, vice-présidente de la Chambre des conseillers, vice-présidente de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), membre du Club des femmes administrateurs d’entreprises, Neila Tazi, Fondatrice de A3 Groupe spécialisé dans les domaines de la communication,  est aussi  productrice
du Festival Gnaoua et musiques du Monde d’Essaouira qui fête cette année ses 20 ans d’existence.


Libé : Pour commencer, quelles promesses faites-vous aux mélomanes de la musique gnaoua à l’occasion de la 20ème édition du Festival Gnaoua et musiques du monde qui se déroule du 29  juin au 1er juillet  ?
Neila Tazi : Nous leur faisons, tout d’abord, la promesse de vivre trois jours de fête, de découverte, d’échange et de culture. De célébrer, aux côtés de milliers de festivaliers, la 20ème édition de l’un des plus grands rendez-vous culturels du pays. Comme chaque année, nous avons programmé des concerts exceptionnels, des fusions inédites réunissant le meilleur de la tagnaouite et des musiques du monde. Cette édition est cependant très spéciale car elle marque un anniversaire et un tournant importants. Nous la célébrerons avec les grands Mâalmines. Ceux qui maîtrisent la scène et la fusion, mais aussi les gardiens du temple et de la pure tradition. Côté musiques du monde, le public pourra revivre des concerts qui ont marqué l’histoire du festival. Je pense notamment à Band of Gnawa qui reprend de grands morceaux rock des années 70 à la façon gnaouie, des reprises de Jimmy Hendrix et des Rolling Stones par exemple. Ces temps forts qui ont marqué la vie du festival, nous les revivrons aussi avec Gnawa Diffusion qui étaient venus en 1999 pour un concert dont on parle encore aujourd’hui. Nous retrouverons également le pianiste Ray Lema, le luthiste Mehdi Haddab, la chanteuse berbère Hindi Zahra, Titi Robin et bien d’autres. Il y aura bien sûr un volet découverte avec le magicien des rythmes venu du Brésil, Carlinhos Brown, mondialement connu pour être le créateur du style samba reggae. Tout comme Lucky Peterson qui viendra chanter le bon vieux blues de Louisiane. Il y aura également le très attendu Ismaël Lô, l’un des plus brillants représentants de la musique sénégalaise.
Nous promettons donc aux festivaliers des moments d’émotion et de bonheur. La musique gnaoua et la magie d’Essaouira sont au cœur de ce festival. C’est ce qui nous a permis de transcender tous les obstacles, tous les doutes pour continuer à nous retrouver 20 après. C’est une belle marque de confiance entre le festival et son public, entre le festival et la ville, entre le festival et les sponsors, entre le festival et les médias.

20 ans après, ne pensez-vous pas qu’il est temps d’actualiser la vision et le concept du festival?
Le festival a un concept fort depuis le premier jour et c’est ce qui en fait un événement fédérateur et unique. Nous sommes cependant dans une réflexion  régulière pour ne jamais nous installer dans un schéma établi. Ceci étant dit, le festival a beaucoup évolué au cours des 20 dernières années. Nous avons ouvert de nouveaux espaces comme le Forum des droits de l’Homme en collaboration avec le CNDH, les concerts au Bastion, les workshops avec les musiciens invités, les ateliers de musique pour jeunes, etc.
Nous sommes à l’écoute des nouvelles formes de créations artistiques et musicales, aux tendances nouvelles. Nous tâchons surtout d’être le plus inclusifs possible et très attentifs à notre environnement local et global.

On vous a parfois reproché le monopole de la gestion du festival. Pensez-vous, à ce propos, qu’il y a suffisamment de coopération et de coordination avec les acteurs locaux ?
Nous n’avons que des messages d’encouragement. Il y a bien sûr quelques rares voix qui s’élèvent pour nous reprocher quelques détails au niveau de la programmation ou de l’organisation. Nous tâchons d’être à l’écoute de tous les avis pour nous améliorer et être à la hauteur des attentes de notre public. Si par “on”, vous faites référence à quelques personnes qui vivent mal le succès de ce festival parce qu’ils n’en sont pas responsables, il est temps qu’ils comprennent justement que personne n’a de monopole et que leurs voix sont inaudibles face à celles qui nous soutiennent et applaudissent nos efforts ininterrompus depuis 20 ans. Les choses sont simples : le festival est conçu, produit et organisé par A3 Communication. Le festival est une marque déposée. C’est surtout un projet culturel que nous portons avec un engagement total depuis deux décennies sans avoir jamais baissé les bras. Vous pensez bien que nous n’aurions jamais pu traverser 20 ans s’il n’y avait pas eu de collaboration étroite avec la ville, que ce soit au niveau des autorités locales, des différents artistes, des acteurs, opérateurs et jeunes de la ville. Cette collaboration formidable est justement à l’origine du succès et de la longévité de ce festival. Nous avons une convention pluriannuelle avec le conseil municipal et le Conseil provincial du tourisme d’Essaouira. Ceci démontre bien qu’il y a une volonté d’institutionnaliser le festival qui occupe désormais une place importante dans la vie de la cité et dans sa promotion à l’échelle nationale et internationale.

20 ans, c’est plus de maturité, beaucoup d’expériences, et tellement d’épreuves à surmonter. Quel bilan faites-vous de ce beau parcours?
Ces vingt années ont été chargées d’enseignements. J’ai appris à voir mon pays de plus près, dans les bons et les mauvais côtés. J’ai appris à mes dépens que la volonté et le travail, seuls, ne suffisent pas. Il faut aussi beaucoup de patience et de détermination pour surmonter les obstacles là où on ne les attendait pas.  Oui, nous avons un pays sublime mais trop de faux problèmes nous font perdre un temps précieux alors que notre jeunesse attend beaucoup de son pays. Il n’y a pas de petit ou de grand projet, ce qui compte c’est de créer de la cohésion et une dynamique nouvelle, ce qui compte c’est de changer les mentalités, de rompre avec les habitudes du passé, de privilégier la confiance et l’écoute, d’améliorer notre gouvernance et de renforcer nos institutions.


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