Enseignement: Faire du neuf avec du vieux

Même avec un ministre septuagénaire, l’Education nationale manque de sagesse


T. El Bachir *
Samedi 5 Décembre 2015

Rachid Belmoktar a vraisemblablement perdu la boussole. Le ministre de l’Education nationale ne sait plus où donner de la tête. Sans stratégie concrète, lui qui est déjà à sa troisième année au poste, il ne fait que patauger dans un secteur qui souffre de grands dysfonctionnements. A 74 ans, âge de la retraite et de peu de concentration, il fait montre d’un manque flagrant de sagesse. Son image au Parlement en train de «chatter» et rigoler, alors qu’une députée l’interpellait sur l’état et les conditions de l’enseignement au Maroc, dévoile une absence totale de prise de conscience et de maturité.
Et si tous les pays accordent une attention   particulière à ce secteur, l’on est loin, au Maroc, des attentes des enseignants et de tout un pays. Rachid Benmokhtar continue ainsi de tourner le dos à cette réalité en poussant tout un pays vers un avenir incertain et hypothétique.
Effectivement, dans un pays qui vit une crise au niveau de son système éducatif, où tout le peuple considère ce secteur comme la deuxième cause nationale, de par son importance, après celle de l’intégrité territoriale, le ministre de l’Education et de la Formation, Rachid Belmokhtar, publie, le 29 juin 2015, deux arrêtés : 2-15-588 visant la séparation entre la formation et la Fonction publique, l’autre 2-15-589 autorisant la diminution de moitié de la bourse réservée aux enseignants stagiaires. Selon le ministre, les deux arrêtés visent à répondre aux différents problèmes dont  souffre l’enseignement. A bien méditer ces  deux arrêtés ministériels, le simple observateur découvre que la politique conçue par le ministre n’est  réellement qu’un slogan pompeux qui répond uniquement aux recommandations  de la Banque mondiale.
En effet,  la publication desdits arrêtés  ne se démarque pas de la vision ministérielle qui accuse toujours le professeur d’être à  l’origine de l’échec du système. Pour remédier à cette situation déplorable, le ministre décide de séparer la formation de la fonction pour soi-disant stimuler les futurs  enseignants, en les contraignant à passer un autre concours de recrutement en fin de stage.  Le deuxième arrêté réduisant la bourse des stagiaires de moitié (de 2450 à 1200DH) trouve sa justification dans le fait que le ministre s’adresse à des étudiants et non à des enseignants stagiaires. Cette politique va à l’encontre des slogans de la qualité et l’institution d’une société du savoir prônés par le ministre en question.
En fait, au moment où le secteur souffre d’une infrastructure précaire et d’une insuffisance des ressources humaines, que l’on estime à 15.000 postes budgétaires, Rachid Belmokhtar prend la décision de ne pas recruter tous les futurs professeurs. Il est à rappeler que ces enseignants en question  intègrent les centres de formation après une présélection et deux examens écrit et oral. Cette politique contradictoire et arbitraire, outre qu’elle donnera lieu à une nouvelle catégorie de chômeurs, favorise des phénomènes anti-éducatifs tels que l’encombrement des classes (parfois 50 élèves pour une seule classe), l’absence de qualité et la déperdition scolaire, entre autres.
Le second arrêté, à savoir la diminution de la bourse, dévoile, encore une fois et sans équivoque, que la réforme du système éducatif n’est qu’une illusion. Effectivement, au moment où le ministre prétend vouloir réformer le secteur, il prive les futurs professeurs de la moitié de leur bourse. Comment peut-on parler de qualité et de compétence chez un professeur stagiaire alors que celui-ci sombre dans une crise financière? Comment peut-on parler d’un futur enseignant qui devra répondre aux attentes de l’école marocaine alors qu’il se préoccupe davantage de ses problèmes personnels? N’est-il pas un citoyen ayant, lui aussi, des droits comme des devoirs?  Face à ces questions, le  ministre s’abstient de tout commentaire…!

 * Enseignant stagiaire


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1.Posté par Patriote marocain le 05/12/2015 15:21 (depuis mobile)
Le système édicatif marocain a besoin d'une vraie réforme, qui prendra en compte les problèmes réels de la société marocaine (socio-économiques en premier lieu). La solution n'est pas de chercher un bouc émissaire (le professeur) à qui imputer la responsabilité, à l'instar de l'Âne de Jean de La Fontaine dans "Les Animaux Malades de la Peste".
Deux décrets vides de sens ne serviront jamais de potiom magique pour les "maladies" de l'enseignement public marocain. Bien au contraire, ces deux "décisions nocturnes", "nées au milieu des vacances d'été, sans aucune approche (ni participative ni autre), renferment, sans aucun doute, une intention malsaine, constituant un premier pas pour le destruction du secteur public (grand fardeau selon le "l'Etat"), sacrifiant l'éducation des générations à venir au profit des lobbies du secteur privé entre autres...
Je pense que tout marocain jaloux quant à sa patrie doit s'opposer à ces deux décrets, et à toute politique traverstie essayant de faire enrichir des êtres humains (ayant le pouvoir symbolique ou matériel) en sacrifiant les droits de leurs semblables.

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