Constitutionnaliser l’impunité et la torture comme crimes contre l’humanité


PAR Hassouni Kaddour Ben Moussa *
Jeudi 5 Mai 2011

Constitutionnaliser l’impunité et la torture comme crimes contre l’humanité
Traduire en justice les tortionnaires des années de plomb est une revendication populaire de sorte que les manifestants demandent à la Commission en charge de la révision de la Constitution de constitutionnaliser l’impunité et la torture pour que les tortionnaires n’échappent pas aux poursuites judiciaires et que les actes de torture et les graves violations des droits de l’Homme ne se reproduisent pas dans un Maroc nouveau fondé sur une monarchie parlementaire dans un processus global et effectif de changement démocratique profond.
De graves violations des droits de l’Homme (incarcération des prisonniers politiques, torture physique et psychologique affreuse, disparition, arrestation arbitraire sans motif, procès inique, assassinat politique, liquidation des opposants …), ont été commises au Maroc pendant les années de plomb. En effet, ces actes n’ont fait l’objet d’aucune enquête judiciaire, les tortionnaires sont assurés de l’impunité, justice soumise à des instructions véhiculées oralement ou par téléphone, et quand un procès est cuisiné et quand on veut obtenir un jugement sur mesure, on choisit le juge qui ne va pas à l’encontre des orientations décidées en haut lieu pour fabriquer un coupable, et dans le cas où un juge intègre rejette et n’admet pas les instructions, cela peut se retourner contre lui, et peut être destitué, suspendu ou déplacé.
Aujourd’hui, les auteurs des actes de torture ont toutes les raisons de penser que leurs faits criminels ne seront jamais sanctionnés par un procès équitable ; quant aux victimes et leurs familles, leur droit à la révélation de la vérité, à l’équité et à la justice est bafoué ; la torture est infligée pour obtenir des aveux et des informations sur les opposants politiques ou l’utiliser pour terroriser les militants des partis politiques. Des méthodes terribles de torture ont été appliquées et utilisées par les tortionnaires jusqu’à la mort : coups de poing et de pied, fouet, chaînes, bâtons, tuyaux en plastique, barre de fer et autres objets durs, autant de méthodes affreuses utilisées sans pitié par les tortionnaires durant les années de plomb. Les dirigeants estiment que les détentions au secret et le reste des dépouilles ne sont pas découverts jusqu’à nos jours !, mais, on se demande perplexe : qui sont les vrais responsables des actes de torture et de disparition ? Personne n’est censé ignorer que les bourreaux ne sont que des exécuteurs aveugles des ordres de l’autorité exécutive, la responsabilité pénale et civile incombe donc aux hauts fonctionnaires de l’Etat chargés normalement de protéger la liberté et la dignité des citoyens.
La convention contre la torture et le statut de Rome définissent une responsabilité pénale internationale pour la torture considérée comme un crime contre l’humanité, l’article 4 de ladite convention fait obligation aux Etats parties de veiller à ce que tous les actes de torture constituent des infractions au regard de leur législation nationale et à ce que ces infractions soient passibles de peines appropriées qui prennent en considération leur gravité ; la convention ne limite en rien cette obligation aux actes de torture qui se rattachent aux crimes contre l’humanité, commis de façon massive ou systématique. L’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme stipule que : « Nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants » ; l’article 10 de la déclaration des Nations-unies contre la torture de 1975 dispose : « Si une allégation concernant d’autres formes de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est considérée comme fondée, le ou les auteurs présumés font l’objet de procédures pénales ou disciplinaires ou d’autres procédures appropriées ».
Tout acte de torture infligé à une personne marocaine ou étrangerère constitue, en effet, une grave violation des obligations qui incombent à l’Etat en vertu du droit international.
La Constitution marocaine doit être conforme aux normes internationales relatives aux droits de l’Homme de sorte qu’elle interdise explicitement la torture et ses méthodes cruelles.
Durant toute la période des années de plomb, et depuis 1962 date de la création du Code pénal marocain, aucun tortionnaire, aucun fonctionnaire de l’Etat d’auteur d’actes de torture n’a fait l’objet d’une interpellation ni d’une poursuite judiciaire ; aucune condamnation n’a été prononcée malgré de nombreuses plaintes. C’est la loi de silence.  
Le droit international affirme clairement que tous les Etats ont l’obligation sans réserve d’interdire la torture et de mettre en mouvement l’action publique afin de traduire les tortionnaires en justice puisque dans un Etat de droit, le glaive de la justice n’a pas de fourreau de sorte que les auteurs des actes de torture et de terrorisme doivent subir les peines appropriées.
Ce qu’il y a de plus horrible au monde, c’est l’impunité ; c’est dans l’enceinte d’un tribunal impartial, public, indépendant que les victimes de torture ont la capacité et la force de faire valoir leur droit et faire entendre leur récit dramatique et leur calvaire dans les centres secrets de détention ; c’est ce qui peut contribuer à leur réadaptation à la vie en société, car les victimes de torture ont perdu leur caractère humain durant les longues années de violence et de brutalité.
Depuis que S.M le Roi Mohammed VI a monté sur son trône, il n’a pas cessé d’exhorter le gouvernement à entamer un ambitieux projet de réforme judiciaire accompagné d’une lutte contre la corruption ; ce projet a été saboté et enterré, en dépit de tout ce qui est arrivé. Le discours historique de S.M le Roi du 9 mars a fait renaître dans les cœurs des marocains beaucoup d’espoir, nous voulons tourner la page d’un système judiciaire d’injustice commandé par des instructions, et vivre une nouvelle ère de justice, d’équité et d’égalité. Si la justice était indépendante, les tortionnaires ne seraient pas libres. Le pire ennemi de la démocratie, c’est l’utilisation de la justice comme un instrument entre les mains du pouvoir exécutif. Des personnes ont été arrêtées et incarcérées au cours des années sombres malgré de sérieux doutes quant à leur culpabilité sans observer les bases de la protection internationale des droits de l’homme qui ont été posées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée en 1984 par l’assemblée générale des Nations unies. Depuis cette date, un grand nombre d’autres textes ont été adoptés au niveau international et régional pour renforcer la protection légale des droits de l’Homme et créer des mécanismes visant à garantir leur respect.    
En tant que membre de l’O.N.U, le Maroc avait souscrit aux principes des organismes internationaux et se trouve par conséquent lié aux normes internationales relatives aux droits de l’Homme, adoptées par l’assemblée générale des Nations – unies.
Le moment est venu de constitutionnaliser l’impunité et la torture comme crimes contre l’humanité pour que la nouvelle Constitution soit conforme aux droits de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus.

 * Avocat au Barreau d’Oujda


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1.Posté par hmina abbas le 05/05/2011 19:03
une vue de l'esprit, de quelqu'un qui n' a jamais vu ce que c'était la torture
Aussi, les pays les plus développés, les plus industrialisés n'ont pas trouvé de solution
entre la nécessité de la défense de l'individu et l'obligation de lutter contre la criminalité, dans le sens le plus large
on tend vers les droits de l'homme, c'est comme en mathematique, on tend vers
Et on trouve quelque part des personnes qui croien, parce qu'ils sont lettrés, avoir trouvé le pactole. Il faut revenir sur terre. trop d'exigences fait perdre le but, comme en fiscal: trop d'impot tue l'impot. Si vous arrivez, cher Monsieur, à gagner le droit à une défense normale, vous avez gagné.
n'oubliez pas que tous les régimes dans le monde, sont basés, mus en puisant leur énergie sur la difference des classes et par la spoliation de la classe la plus faible.
voyez ceux qui paient l'impot chez nous. Un monde idéal, tel que vous le pensez, n'existepas et n'existera pas. Victor Hugo isait : ceux qui luttent sont ceux qui vivent; Il n'y a pas d'alternative à la lutte pour les droits. Ils ne viendront pas tous seuls, et le contraire n'est pas souhaité

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