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​En Birmanie, la lumière se fait attendre


AFP
Mercredi 3 Décembre 2014

​En Birmanie, la lumière se fait attendre
Quand le village de Saw La Yar Koo, dans l'est de la Birmanie, a demandé à être raccordé au réseau électrique, les autorités ont réclamé 10.000 dollars. Alors, les familles se sont endettées. Mais dix mois plus tard, elles sont toujours dans le noir.
Les enfants du village continuent à faire leurs devoirs à la bougie et les dîners sont cuisinés sur des feux de bois. En Birmanie, 70% de la population n'a pas accès à l'électricité.
Le pays cherche à combler son retard énergétique pour réduire la pauvreté et faciliter l'arrivée de capitaux, alors que les investisseurs se pressent depuis l'ouverture du pays en 2011 après des décennies d'isolement.
L'ancien Etat paria, dont la moitié de l'énergie provient de barrages hydroélectriques, a donc prévu de nouvelles constructions pour doper sa production électrique.
Mais ces méga-projets sont souvent sources de conflits. Souvent situés dans les régions instables du pays, où vivent les minorités ethniques, ils ont largement contribué à exacerber les tensions ces dernières années. 
Pour les populations, ces travaux sont rarement synonymes d'arrivée concrète de l'électricité.
Dans le village de Saw La Yar Koo, les habitants perdent patience. 
"Si nous avions l'électricité, nous pourrions cuisiner, utiliser des ordinateurs, les enfants pourraient étudier. J'ai pris des cours d'informatique mais je ne peux même pas m'entraîner à la maison", explique Pi Rar, une jeune femme de 24 ans, qui dit se sentir trahie.
Devant sa maison, dans les rues poussiéreuses au milieu des charrettes tirées par des boeufs, un transformateur électrique rutilant traîne. Après les premiers paiements, les autorités ont annoncé aux familles qu'il fallait ajouter 350 dollars à la somme déjà versée.
"J'ai dû emprunter la moitié des 80.000 kyats (la somme initiale de 80 dollars). Maintenant ils nous disent qu'il faut encore payer pour raccorder les maisons", se désespère la jeune femme, dans sa maison au plafond noirci par le feu de bois qui sert à la cuisson des repas.
Les producteurs de maïs de ce village risquent de traîner ces dettes comme un fardeau alors qu'ils espéraient pouvoir enfin profiter de la relative période de paix après des années de conflit armé.
L'Etat a promis de raccorder la moitié de ses habitants pour 2020 et la totalité pour 2030 dans l'espoir de réduire la pauvreté et doper les investissements.
Mais pour les ONG, la multiplication des projets de barrages hydroélectriques n'est pas une bonne nouvelle.
Elles craignent notamment que Lawpita, le plus gros barrage du pays, qui produit un quart de l'électricité, puisse servir de modèle pour les futurs projets du gouvernement.
Le bilan de cette construction est en effet désastreux, d'après les organisations non gouvernementales: des centaines de personnes déplacées, la présence renforcée de soldats, la confiscation de terres, des violences sexuelles et du travail forcé...
Les barrages sont "des démultiplicateurs de conflits" alors que le pays lutte déjà pour négocier la fin d'un demi-siècle de combats entre armée et rébellions de minorités ethniques, explique Elliot Brennan, chercheur auprès de Institute for Security and Development Policy.
L'électricité, bien que souvent produite dans les zones où vivent les minorités ethniques, sert principalement à alimenter les grandes villes comme Rangoun, Mandalay ou Naypyidaw, engendrant un profond ressentiment des populations locales.
"Ce qui est dans notre Etat, nous devrions pouvoir en avoir une partie. Mais l'électricité de l'Etat de Kayah part ailleurs. La plupart des projets du gouvernement sont comme ça", explique Mi Reh, chercheur du Burma Rivers Network.
Dans l'Etat Kayah, la plupart de l'énergie provient de Lawpita, mais les autorités locales ont admis que si le barrage produit 210 mégawatts pour le réseau national, seulement 15 revient à l'Etat Kayah. 
En 2011, prenant tout le monde à contre-pied, le président Thein Sein avait suspendu un projet de barrage hydroélectrique géant, sur la rivière Irrawaddy dans le nord de l'Etat Kachin, dont l'électricité était destinée à la Chine.  


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